L'asile

Avec « La crypte », Le Donjon s’était essayé au genre horrifique avec beaucoup de réussite. À l’époque, l’enseigne d’escape game de la place de la République parisienne avait prévenu : elle préparait une seconde aventure flippante, cette fois sur un tout autre thème, plus perturbant, plus dérangeant. Son nom ? « L’asile », tout simplement.

Nous voilà une fois de plus convoqués par ce  ̶b̶o̶n̶  vieux comte Molay en ce mois de septembre 2025, près d’un an après l’inauguration de la salle. Le jeu n’a même pas encore commencé que Le Donjon nous fait basculer dans la période qui s’étend entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe, grâce à la rencontre d’un inquiétant personnage…

Le scénario

« Vous êtes invités à participer à une démonstration publique présentant les dernières avancées dans la recherche du Dr Molay, visant à guérir les pires psychopathes. Il a appris auprès des plus grands esprits de notre époque, afin de guérir les éléments les plus corrompus de notre société.

Nous espérons que cette expérience va vous redonner espoir en l'humanité et que vous apprécierez participer à cette exposition révélatrice. »

Entre neurologie, psychiatrie et biologie

Au travers de ses créations, Le Donjon a souvent à cœur de revisiter les arcanes de l’histoire. C’est une nouvelle fois le cas dans cet asile. Ses énigmes, mais aussi et surtout ses décors sont prétextes à découvrir certains travaux neurologiques, psychiatriques et biologiques menés aux XIXe et XXe siècles ; à explorer les méthodes et tâtonnements régulièrement barbares employés par les grands pontes de l’époque dans ces domaines ; à se pencher, enfin, sur l’un de leurs sujets d’études privilégiés : les premiers serial killers parisiens. La room regorge d’outils, instruments et objets d’alors, qui ont été chinés, mais aussi d’accessoires beaucoup plus… organiques ! Une pièce en particulier est superbement détaillée, à tel point qu’on ne sait plus où poser les yeux lorsqu’on y entre.

L’espace de jeu se prêterait presque à être visité avec un guide conférencier, comme nous avons eu la chance de le vivre à l’issue de notre partie avec l’un des créateurs, un fin connaisseur. Cette impression est d’ailleurs appuyée par le fait que, comme d’habitude au Donjon, un récit audio fait office de fil rouge : il est certes assez artificiel car extradiégétique, mais il accompagne parfaitement le parcours des équipes en leur présentant les différents lieux qui jalonnent l’heure.

Les casse-têtes de « L’asile » sont quant à eux thématisés, mais pas vraiment intégrés à la situation dans laquelle on est plongé – à l’exception de la fin, qui à notre avis est cependant trop répétitive pour être entièrement satisfaisante. Leur construction est la plupart du temps simple, peut-être un peu trop parfois, à l’image de cette étape coopérative qui aurait pu amener les joueurs à réfléchir et agir ensemble, plutôt que les uns à la suite des autres. Régulièrement, il s’agira de lire un document et de suivre une consigne après avoir analysé la situation. Deux énigmes sortent malgré tout du lot, engendrant des moments de brainstorming collectifs que l’on aime tant. 

Le gameplay reste globalement agréable car d’une fluidité absolue. Nous n’avons d’ailleurs eu besoin d’aucune aide. Les mécanismes pourraient être décrits de la même façon : plaisants à manipuler mais simples. Mis à part le tout premier, qui fait très forte impression grâce au formidable acting du ou de la comédienne qui animera votre session, pour une fois au Donjon les interactions avec les décors nous ont paru relativement basiques.

De nombreux contacts physiques

Il faut absolument évoquer plus en détails ces premières minutes justement, extrêmement marquantes voire malaisantes. Elles pourraient quasiment faire office d’expérience de psychologie sociale. Cette introduction met en lumière la performance du ou de la game master, présageant du rôle prépondérant qu’il occupe pendant l’entièreté de la mission, de toutes les interventions qu’il vous prépare.

Comment se manifestent ces interventions ? Déjà, il nous paraît important que vous le sachiez, dans cet escape game les contacts physiques sont nombreux. Ils sont un peu étonnants parfois, fermes mais jamais brutaux ni violents. Ce style d’horreur, qui n’existait pas vraiment à Paris avant cette salle, trouvera sans aucun doute son public. Il ne conviendra bien sûr pas à tout le monde, et si vous n’êtes pas à l’aise avec l’idée d’être touché n’hésitez pas à prévenir le GM afin qu’il s’adapte. Au-delà de cet aspect, la crédibilité des interventions nous a interrogé étant donné que le personnage auquel on a affaire ici est présenté comme un horrible sanguinaire qui a réellement existé à la fin du XIXe siècle… En voici donc une version tactile certes, mais surtout très taquine et clémente !

Quand il ou elle ne vous touchera pas, le maître du jeu mettra tout en œuvre pour vous faire sursauter.

Mention spéciale pour l’excellent twist final, encore une fois soutenu par un acting qui, lors de notre partie, était convaincant et impeccable. D’ailleurs, il faut bien reconnaître que l’intérêt de « L’asile » repose en grande partie sur l'omniprésence du game master.

Le Donjon a essayé de faire en sorte que son aventure convienne au plus grand nombre : « L’asile est un escape game d’horreur. Les plus sensibles peuvent cependant nous contacter pour demander une expérience adaptée », explique l’enseigne sur son site web, tout en assurant que « le jeu reste très agréable en abaissant le niveau de peur ».

Découvrez le teaser vidéo de la salle « L'asile » :